Tout praticien qui exerce dans le domaine de la psyché, doit user de délicatesse (ou tact psychique) : c’est ainsi que selon moi, se pratique une psychanalyse existentielle & humaniste.
Précautions et délicatesse :
Cela ne signifie certainement pas prendre des précautions inutiles, ni faire preuve d’une distanciation ni d’une froideur outrancière. L’acte thérapeutique ne se crée pas dans la dispense d’un don de soi qui serait mortifère mais plutôt dans l’engagement de tout son être.
Ni mesure, ni condescendance, ni castration, ni diatribe intempestive, ni maladresse, le lien thérapeutique est réjouissance.
Cette délicatesse signifie bien sûr la finesse, la précision de l’analyse, mais elle ne peut s’écrire que dans la joie existentielle. C’est en tout premier lieu une existence que je rencontre mais plus en deçà l’Etre, la Vie. La psychanalyse est une rencontre à la fois humaniste et existentielle.
Délicatesse et structures :
Qu’il nous est facile de traverser l’être, et de structures et de symptômes et de pathologies ! Cette clinique nous conduit souvent à la caricature, et nous éloigne rapidement des fondements de la thérapie. Parfois d’ailleurs, le patient, influencé par les médias et leur fameux développement au bien-être se stigmatise au préalable. Et il faut souvent désenchaîner ces artifices pour que le cheminement commence.
En outre, cette tendance à la stigmatisation est aujourd’hui contredite par la découverte d’une porosité structurelle, ou par la difficulté insurmontable de caractériser par ses seuls symptômes une pathologie.
Délicatesse et parole pleine :
Dans la pratique, il y a d’abord l’écoute non pas simplement du signe, mais de l’être qui surgit face à nous. Cette écoute qui se veut délicate doit être sans jugement, sans canon de la normalité ou de la folie, elle doit être entière comme la parole pleine et entière du patient. Je dirai même, il n’y a pas de parole pleine et entière du patient sans cette écoute délicate.
Il faut s’émerveiller de cette toute puissance de la Vie : tant la fragilité du patient, tant l’enchaînement répétitif des signifiants, que les déplacements et les substitutions symboliques expriment la Vie !
La délicatesse en thérapie comme en psychanalyse est le rempart à l’immuable et impossible réel. N’oublions pas que nous nous adressons au trauma, à cette effraction du réel à la conscience et qu’il nous faut explorer ce qui en suinte.
de Frédéric Lemonnier, Psychanalyste, thérapeute & psychopraticien à Compiegne